Aux Pays-Bas, le Secrétaire d'Etat à la Santé s’occupe à interdire les nicotine pouches et bientôt les arômes de vape
Interdiction avec effet immédiat des nicotine pouches
Le Secrétaire d’État à la Santé néerlandais ne semble pas avoir les mêmes priorités que sa population. Ces derniers mois, il a chargé ses services de trouver un moyen d’interdire la vente de nicotine pouches. Ces petits sachets, remplis d’une pate à base de cellulose aromatisée et contenant de la nicotine, s’utilisent à la manière des sachets de snus en les glissant entre gencive et lèvre.
À la différence du snus, les nicotine pouches ne contiennent pas de tabac. Le Secrétaire d’État à la Santé néerlandais a jugé qu’ils doivent être soumis à la législation sur les denrées alimentaires. Dans ce cadre, ses services ont déniché un avis de l’Autorité européenne sur la sécurité alimentaire (EFSA) de 2009 recommandant une limite maximum (MRL) de nicotine à 0,035 mg par kg à propos de champignons sauvages importés de Chine.
Un sachet de 0,7 gr contient environ de 4 mg à 15 mg de nicotine, dans la catégorie la plus forte (20 mg/gr). Environ 20 % de cette nicotine est absorbée par l’organisme du consommateur à travers les muqueuses buccales. Comme les nicotine pouches dépassent largement le seuil de 0,035 mg de nicotine par kg, le Secrétaire d'Etat a justifié leur interdiction de vente en les qualifiant d'aliments nocifs.
Des grimoires du 19e siècle pour base réglementaire
Consommation involontaire de nicotine dans des aliments censés ne pas en contenir et consommation volontaire de produits nicotinés à risque réduit sont-elles similaires ? Paul Blokhuis ne s’embarrasse pas de ce genre de considération. Ni des précautions de l’EFSA prévenant en 2009 que son « avis est affecté par un certain nombre d’incertitudes et de limites. En conséquence, l’EFSA recommande que la limite MRL proposée soit considérée sur une base temporaire ».
Depuis, le Pr Bernd Mayer, toxicologue à l’Université de Graz (Autriche), a retracé la source sur laquelle s’appuient des organismes, tels que l’EFSA l’a fait en 2009, pour déterminer la dose de nicotine considérée dangereuse. « Ce sont des auto-expériences douteuses faites par des médecins allemands du 19e siècle qui sont à l’origine de la dose communément acceptée », assure le toxicologue de l’Université de Graz (Autriche) à la revue Science et avenir en 2014.
« Seuls les e-liquides à saveur de tabac pourront être en vente »
S’il est passé outre les parlementaires pour interdire les nicotine pouches, Paul Blokhuis leur a écrit une lettre le 9 novembre. Il y précise notamment l’avancement des travaux de ses services concernant l’interdiction des arômes de vape autres que goût tabac. Il espère que cette interdiction entre en vigueur en juillet prochain.
« Le règlement ministériel contiendra une liste exhaustive des aromatisants qui pourront encore être ajoutés aux liquides pour cigarettes électroniques, avec pour point de départ que seuls les e-liquides à saveur de tabac seront sur le marché », assène le Secrétaire d’État, membre du parti de l’Union Chrétienne (CU).
Il a chargé l’Institut national de la santé et de l’environnement (RIVM) de déterminer les substances se trouvant dans les e-liquides goût tabac. « Sur la base de cette analyse, le RIVM propose une liste de 23 aromatisants », précise Paul Blokhuis qui a envoyé cette liste blanche à la Chambre.
Liste de 23 aromatisants sur les 503 actuellement dans les e-liquides saveur tabac
Le rapport du RIVM a recensé 503 aromatisants utilisés dans les e-liquides à saveur tabac actuellement sur le marché néerlandais. Sur le mandat du Ministère de la Santé, le RIVM en a retenu 23 répondants aux critères pour « s’assurer que seules les substances ayant le goût du tabac ou se trouvant dans le tabac restent en usage ».
Cependant, le rapport du RIVM souligne le risque de conséquences négatives à une liste trop restrictive. « Les adultes utilisent les e-cigarettes pour arrêter de fumer. Cet outil pourrait devenir moins attrayant pour eux si la gamme d’arômes est limitée. En outre, si le nombre d’arômes autorisé est fortement réduit, les utilisateurs d’e-cigarettes pourraient eux-mêmes ajouter des arômes », prévient le RIVM.
44 % des tentatives d’arrêt tabagique se déroulaient avec la vape en 2016
Dans une enquête menée en 2016 par l’International Tobacco Control (Eurest-ITC) sur les moyens d’arrêter de fumer les plus utilisés, les Néerlandais étaient 43,8 % à déclarer utiliser le vapotage pour cela. La vape était de très loin l’outil le plus utilisé par les fumeurs néerlandais pour arrêter, dont près d’un tiers (31,5 %) avaient tenté dans l’année précédente. Les années suivantes, lors des suivis de cette enquête, cette option de réponse a disparu du questionnaire pour les Néerlandais.
Globalement, le tabagisme est passé de 25,7 % à 20,2 % entre 2014 et 2020. Prétexte à l'interdiction des arômes de vape, les jeunes n'ont pourtant jamais été aussi peu à fumer aux Pays-Bas. Le tabagisme du groupe d'âge clef des 18 à 24 ans est passé de 35,3 % en 2014 à 23,2 % en 2020, dont la moitié de fumeurs occasionnels, selon l'Institut Trimbos.
Quel rôle le vapotage a joué dans la baisse accélérée du tabagisme de cette génération ? Les autorités sanitaires néerlandaises ont plus été occupées à préparer les interdictions qu'à tenter de comprendre le phénomène.
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