Les fumeuses vérités alternatives de la NZZ pour inventer le 'vapotage passif'
Le
quotidien zurichois n'en est pas à son coup d'essai. En matière
d'articles pour répandre la peur du vapotage, la Neue Zurcher
Zeitung (NZZ) a une longue collection. Cette fois-ci, la NZZ exhume
le spectre fantasmatique du 'vapotage passif' affirmant en
titre qu'il est "nocif". L'objectif
de l'article
publié ce week-end s'éclaire dans ses
conclusions: justifier de réprimer les vapoteurs. Avec la
conséquence de pousser les fumeurs suisses à rester aux cigarettes.
La NZZ, qui fût jadis un quotidien de référence, sombre avec cet
article de Frederik Jötten dans une affligeante suite d'enfumage de
ses lecteurs. Confus et manipulateur, il se base sur une unique étude
vieille de cinq ans, dont la critique à l'époque pour sa mal
conception et ses résultats incohérents est ici passée sous
silence. Pour masquer son enfumage, le journaliste allemand omet les
dizaines d'études existantes et les rapports scientifiques
pertinents sur le sujet. Non content de cet indigeste hirsebrei,
Frederik Jötten le parsème d'erreurs factuelles grossières
sur la situation légale en Suisse pour conclure dans un
rapprochement incongru avec les cigarettes chauffées, finalisant son
fantasme de repousser les vapoteurs au tabagisme.
Passif NZZ sur le vapotage
La
NZZ assume avec ce nouveau torchon sa vieille ligne contre l'outil de
sortie du tabagisme. Ses colonnes ont ainsi
accumulé accusation "d'effet
passerelle" en
2015, où la vape ferait exploser le nombre de jeunes fumeurs ce qui
ne s'est vérifié ni en Suisse ni ailleurs, puis diffusion en avril
2016 d'un hoax particulièrement grossier sur la présence de drogue
dans les liquides de vapotage, avant un
appel à "durcir" la
répression contre les vapoteurs récemment. En contraste de ces
diatribes anti-vapoteurs, le traitement par le journal proche des
milieux financiers zurichois des nouveaux produits des cigarettiers
est beaucoup plus pondéré et sérieux. NewsBuzzters
s'étonnait en juin 2016 de cet écart produisant pour ainsi
dire un effet de publicité comparative. Ce nouvel épisode de
la campagne de la NZZ contre la menace du vapotage, qui a fait
dégringoler les ventes de tabac où il s'est développé, reprend la
vieille méthode du cherry-picking pour inventer un "vapotage
passif" nocif selon le journal.
Une seule étude citée de 2013
Comme
le premier site conspi' venu, la NZZ va chercher une étude et
occulte l'existence de dizaines d'autres. "L'une
des rares études dans lesquelles les effets du
tabagisme électronique passif ont été examinés vient des
autorités de santé publique de Bavière", nous révèle
d'emblée Frederik Jötten (mon emphase). Mazette! Les scientifiques
du Public Health England (2015), du Royal College des médecins
britanniques (2016), de Truth Initiative (2016) et de l'Université de Victoria (Canada, 2017) auraient donc halluciné en analysant des
centaines d'études dans leurs rapports respectifs. "Le
vapotage relâche des niveaux négligeable de nicotine dans l'air
ambiant et ne présente aucun risque sanitaire identifié pour
l'entourage", conclut pour sa part le rapport du Public Health England.
Mais
la NZZ détient visiblement la "rare" vérité
alternative. Le journal ne se donne même pas la peine de livrer sa
référence précisément. En fait, il s'agit d'une vieille étude
publiée en
2013 dans l'International Journal of Hygiene and Environmental
Health. Les faiblesses méthodologiques avaient été critiquées
dans une réponse publiée dans la même revue. La NZZ n'en souffle
pas un mot à ses lecteurs. Le travail signé du Pr Wolfgang Schober
est résumé par la NZZ: "après
deux heures à fumer des e-cigarettes, du formaldéhyde cancérigène,
de l'alcool benzylique allergène et de la nicotine ont été
détectés dans l'air".
A quel taux et selon quelle méthodologie, les lecteurs de la NZZ
n'ont pas le droit de l'apprendre.
Des
mesures effectuées différents jours
A
l'époque, la
critique des Dr Farsalinos et Voudris remarque
que les mesures comparatives de l'étude n'ont pas été effectuées
le même jour ni dans les mêmes conditions. "Ce
sont des limites importantes [à la valeur de l'étude]. Des études
ont montré qu'il y a des variation significative d'un jour à
l'autre des niveaux environnementaux des hydrocarbones aromatiques
polycycliques (PAH)",
expliquent les chercheurs du Centre de cardiologie Onassis d'Athènes.
S'ensuit la liste d'une série d'incohérences dans les données
rapportées par l'étude allemande. Autrement dit, on peut douter que l'étude allemande
ait maîtrisé un sujet nouveau à l'époque et ce soit donné des conditions suffisantes pour être fiable.
Dans une réponse à la réponse, les chercheurs allemands reconnaissent avoir fait des mesures comparatives différents jours, mais estiment la pollution munichoise trop faible (sic!) pour expliquer les différences. Ils concèdent que "les particules liées au vapotage ne sont pas générées par un processus de combustion, mais par évaporation directe. En raison de cette différence de principe opératoire, les particules de vapotage diffèrent bien sûr dans leur composition chimique et dans la distribution de taille de celles des cigarettes de tabac", sans que cela ne lève leurs doutes.
De
son côté, le Royal College des médecins britanniques note en 2016 que
l'étude bavaroise, présentée comme unique pièce scientifique par
la NZZ, est la seule à avoir alerté sur des émissions néfastes
d'hydrocarbones aromatiques polycycliques (HAP), des substances
produites en pyrolyse, par le vapotage. "Il n'y a,
jusque-là, aucune preuve scientifique que l'exposition passive au
vapotage ne puisse causer des dommages sanitaires significatifs.
Seule une étude [l'étude munichoise de Schober et al.] a rapporté
des niveaux d'hydrocarbones aromatiques polycycliques qui seraient
au-dessus des limites d'exposition de sécurité", précise
le rapport (p. 84) de l'institution britannique de premier plan dans l'histoire de la santé publique.
26
études analysées par l'Université de Victoria
Depuis
cette étude munichoise, les recherches se sont multipliées. Le rapport
scientifique de l'Université de Victoria (Canada), publié
en janvier 2017, a trouvé et analysé 26 travaux sérieux concernant
spécifiquement le vapotage secondaire. Il conclut qu' "aucune
exposition significative à des cancérogènes tels que ceux trouvés
dans la fumée du tabac" n'est
relevée pour l'entourage des vapoteurs. Concernant la nicotine, le
rapport canadien stipule "une
exposition mesurable mais faible" sans
que l'on sache si "l'exposition
à un si faible niveau pose un risque pour la santé".
Plus
tranchant, le
rapport du Public Health England précise que "les
partenaires de vapoteur.es ont en moyenne des concentrations de
cotinine [ndr. métabolite de la nicotine] de 0.19ng/ml de salive et
1.75ng/ml dans l'urine, ce qui est environ 1'000 fois moins que les
concentrations chez les fumeurs et se situe au niveau du taux de
cotinine généré en mangeant une tomate".
Profitons-en pour rappeler que tomates, aubergines, carottes,
patates, choux-fleurs, poivrons, etc. contiennent de la nicotine. En
manger semble donc sous cet aspect (étroit) aussi dangereux, ou
bénéfique, que côtoyer un vapoteur.
Post-vérité
versus réalité
Mais
les rapports scientifiques ne pèsent pas lourds pour le quotidien
zurichois face à une autre mystérieuse mesure que le journal brandit sans donner quelconque référence. Là, je suppose, sans certitude, que
Frederik Jötten se réfère à la ridicule mesure prise dans le hall
d'un restaurant à l'insu des participants à un congrès sur le
vapotage à l'été 2015. En plus de la perversité du procédé, le
fait de mesurer la pollution particulaire dans un restaurant
préparant le repas de centaines de convives avec les dégagements
que l'on connait à cette activité est simplement honteusement
malhonnête intellectuellement. Mais peut-être que la NZZ, tournée
résolument vers l'ère de la post-vérité, parle d'autre chose, son
absence de source à ses affirmations les rend difficiles à retracer.
Plus
solide et dans le monde réel, une étude de l'Université d'Etat de
San Diego - dont
nous avions parlé - a mesuré durant une semaine la
pollution intérieure de 256 logements. Chez les fumeurs de
cigarettes et de joints, la pollution intérieure explose lorsqu'ils
fument. Les niveaux de pollution particulaires chez les vapoteurs ne
sont pas discernables de ceux des logements de non-fumeurs. "Nous
n'avons observé aucune différence apparente dans la moyenne
hebdomadaire de la distribution de particules entre les 43 logements
reportant un usage [en intérieur] de vapotage et ceux ne déclarant
aucun usage",
soulignent les auteurs de l'étude publiée en mai
dernier dans PlosOne. Par contre, cuisiner,
surtout la friture, faire le ménage, ce qui soulève de la
poussière, allumer une bougie ou faire brûler un encens produisent
une pollution mesurée au contraire de vapoter selon ces résultats.
Où
sont les atteintes sanitaires?
Après
avoir enfumé ses lecteurs, le journaliste de la NZZ se croit
autoriser à assimiler le vapotage au tabagisme, et de là à
exiger des interdictions similaires dans la
prochaine loi sur les produits du tabac LPTab. Sauf que même avec
ces références occultes ou périmées, Frederik Jötten ne montre a
aucun moment que des atteintes à la santé justifient son désir
répressif des vapoteurs. Passé son titre et son jeu d'impressions effrayantes, son papier est
passablement vide pour soutenir quoi que ce soit.
Or non seulement le vapotage réduit massivement les toxiques pour l'usager par rapport au fait de fumer. Mais la réduction des dégagements secondaires est encore bien plus importante par la forme d'usage: une cigarette se consume entre deux bouffées, pas le vapotage. Or, autour de 85% des toxiques relâchées lors de la consommation d'une cigarette le sont par le "sidestream". En contraste, les nuages des vapoteurs paraissent impressionnants. La capacité des médiums du vapotage, à savoir le propylène glycol et le glycerol, à capter jusqu'à 2000 fois leur volume en humidité fait que pour pour plus de 75% ce nuage est un brouillard d'eau (avec des variations selon les conditions hygrométriques de l'environnement), et plus de 24% de glycérine (PG et/ou VG).
En outre, la nature de l'aérosol de vape fait qu'il se dissipe de moitié (demi-vie) en moins de 30 secondes, contre environ 20 minutes pour la fumée de cigarette. Concernant la nicotine, celle exhalée par un vapoteur, ayant atteint un niveau de nicotémie similaire au fumeur d'une cigarette, est en deçà de 1% de celle rejetée par la cigarette. A ces doses, aucun effet négatif n'a été constaté sur des adultes. Le monoxyde de carbone est absent, tout comme l'énorme majorité des plus de 7'000 substances produites par la combustion d'une cigarette.
Mesures
de l'étude par l'Institut biomédical de Barcelone
A
noter qu'elles ne distinguent pas particules solides et liquides
|
Le
mauvais exemple d'arrêter de fumer
Peut-être par conscience d'avoir un bien maigre dossier sur l'aspect sanitaire
direct, Frederik Jötten nous sort du chapeau le mauvais
exemple que donneraient les personnes ayant arrêté de
fumer avec la vape. "Même
les ex-fumeurs pourraient être encouragés à fumer",
affirme le journaliste. La semaine prochaine, la NZZ
appellera peut-être à interdire le jus de pomme et le Rivella
dans les lieux publics pour éviter d'inciter des ex-alcooliques à
boire. Ce fantasme récurrent d'une vape pervertissant les pauvres
fumeurs a été démoli de longue date par des chercheurs en sciences
sociales. Plutôt que, par on ne sait quel étrange phénomène,
d'inciter les fumeurs à fumer, l'exemple du vapotage en amène
certains à tenter de sortir du tabagisme.
"Même
les ciga-likes de première génération [aujourd'hui disparues]
étaient visuellement différentes des cigarettes, et leur vapeur
exhalée facilement discernables de la fumée de cigarettes en termes
d'apparence, d'odeur et d'irritation, rendant la confusion peu
probable entre vapotage et tabagisme dans les lieux couverts par la
législation sans fumée",
expliquent les auteurs du
rapport (p.128) du Royal College of Physicians britanniques,
qui ont visiblement plus de contact avec le réel que le journaliste
de la NZZ et ses interlocuteurs.
La
chasse aux mauvais ex-fumeurs
En
France, le Pr Bertrand Dautzenberg, réticent dans un premier
temps, a
constaté que "le
vapotage ringardise le tabagisme".
Désormais, le pneumologue espère même "aider
les fumeurs à goûter au plaisir de vapoter, au plaisir de
s'éloigner de la tueuse qu'est la cigarette", déclare
t-il au Monde. Mais peut-être est-ce justement
ce mauvais exemple
de la sortie du tabagisme qui dérange tant la NZZ? Principales
victimes de ce mouvement de santé publique autogérée, les ventes
de cigarettes et de médicaments ont souffert de l'engouement des
usagers vers le vapotage dans plusieurs pays.
Resterait
donc la question de la bienséance. Les démocratie libérales optent
généralement de laisser à la population le soin de réguler par
elle-même, dans les relations inter-individuelles, ce type de
problèmes. Les sociologues appellent cela les normes, en contraste
des règles ou des lois. Quelqu'un qui se parfume exagérément n'est
pas interdit de lieux publics, mais il peut encourir quelques
remarques. Sans autre justification sérieuse, on voit difficilement
comment accepter que la loi instaure une restriction de libertés
aussi manifestement discriminatoire pour une catégorie de la
population, dont visiblement le seul défaut est d'avoir stopper la
consommation de cigarettes et de médicaments qui est liée. Le point
est particulièrement sensible pour favoriser la sortie du tabagisme
des fumeurs en passant au vapotage. Leur mettre des entraves
artificielles concourt à les condamner aux cigarettes.
La
NZZ fait sa loi
Après
les mensonges sur l'état de la science, des délires sur le rôle de
la vape face au tabagisme, le journaliste de la NZZ, que rien ne
retient visiblement, prétend que le vapotage n'est pas taxé comme
le tabac "parce
que les liquides avec nicotine ne peuvent pas être vendus en
Suisse".
La NZZ refait donc aussi ses
propre lois et décide d'abroger la
motion Zanetti qui en 2011 a exonéré le vapotage d'impôt
punitif "pour
aider les fumeurs à abandonner la cigarette".
Allez soyons charitables, on a bien compris que c'est le désir de la
NZZ, tout comme
de Philip Morris et de
la Commission fédérale de prévention du tabagisme (CFPT),
que de punir au porte-monnaie les vapoteurs d'avoir arrêter de
fumer. Mais en dépit des fantasmes de la NZZ, la loi protège ce moyen de
sortie du tabagisme pour le moment.
Le
journaliste termine évidemment en faisant l'amalgame entre les
cigarettes chauffées et le vapotage, histoire de justifier tout son
laïus inconsistant à faire prendre la vapeur pour de la fumée.
Citant la
recherche dirigée le Dr Reto Auer à l'Université de
Lausanne à propos de l'Iqos, mais sans en avoir compris le contenu.
Selon cette étude, dans l'Iqos se produit de la pyrolyse, autrement
dit de la combustion imparfaite, ce qui dégage de la fumée et non
pas seulement de la vapeur comme avec le vapotage. Un point essentiel
pour distinguer le vapotage du tabagisme.
Die NZZ krieg
Comme le note DampfFreiheit, la NZZ a déclenché une blitzkrieg contre le vapotage ce mois. Peu probable que son feu nourri ne s'arrête là contre la vaporisation, alors que les autorités élaborent le nouveau projet de loi sur le tabac (LPTab) visant toujours à assimiler le vapotage au tabagisme. Les milliards du tabagisme, y compris ceux des très lucratives maladies évitable qui lui sont liées, sont en jeu face à l'outil de réduction des méfaits et le mouvement de santé spontanée de la population.
La seule question que soulève cet article est : quels sont les liens du journaliste Frédéric Jötten avec l'industrie du tabac et dans ce cas combien a-t-il touché ?
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