USA: Malgré l'hystérie anti-Juul, des experts de santé publique appellent la FDA a revenir à la raison [MàJ]

"Nous espérons que la FDA réfléchira avant de prendre d'autres mesures sur le marché du vapotage". La lettre ouverte de sept experts de santé publique, reconnus pour leur engagement dans la lutte anti-tabac, calmera t-elle Scott Gottlieb, le Commissaire de la Food and Drug Administration (FDA)? On peut craindre que l'appel (voir en fin d'article) publié ce matin de Tom Miller, procureur général de l'Iowa, des Prs David Abrams et Raymond Niaura, de l'Université de New-York, Lynn Koslowski, de l'Université de Buffalo, David Sweanor, de l'Université d'Ottawa,  Thomas Glynn, de l'Université de Stanford et Clive Bates, ancien dirigeant de l'Action on Smoking and Health (UK) arrive trop tardivement.

[Mise à Jour 19h: Effectivement, Scott Gottlieb vient d'annoncer sur le site de la FDA l'élaboration de mesures restrictives. Extrait: "Aujourd'hui, je demande au Center for Tobacco Products (CTP) de la FDA de revoir la politique de conformité telle qu'elle s'applique aux produits aromatisés de vapotage, y compris tous les arômes autres que le tabac, la menthe et le menthol. Les modifications que je cherche à initier protégeraient les enfants en limitant la vente de tous les produits aromatisés de vapotage (sauf les arômes de tabac, de menthe et de menthol et les produits non aromatisés) dans des emplacements restreints pour l’âge, et, s’ils sont vendus en ligne, selon des pratiques rigoureuses de vérification de l’âge". A suivre...]

Moins de 3% des 15-18 ans vapotent 10 jours par mois

Ces dernières semaines, Scott Gottlieb a multiplié les interventions dans les médias pour dénoncer l'utilisation de vapotage par les jeunes et annoncer l'arrivée imminente de mesures de rétorsions. Son crescendo narratif est monté en sensationnalisme passant de "l'épidémie" à la "tragédie", sans pour autant présenter quelconque donnée vérifiable sur le sujet. De leur côté, les sept spécialistes remarquent que les "dernières données publiées datant de 2018 indiquent que moins de 3% des jeunes âgés de 15 à 17 ans utilisent des cigarettes électroniques 10 jours ou plus par mois", regrettant que "cette étude ne présente pas de ventilation indiquant l'utilisation quotidienne".

"Il est essentiel de distinguer utilisation expérimentale ou régulière chez les jeunes", insistent-ils. Une utilisation quotidienne par "1% à 2% des jeunes", une estimation réaliste en regard des données citées, ne devrait pas créer la panique actuelle. "S'ils sont également fumeurs actuels, anciens ou susceptibles d'utiliser des produits du tabac combustibles, l'utilisation de vape peut leur être bénéfique en réduisant le fardeau sur la santé", poursuivent-ils. A partir de ce constat, les experts menés par le procureur Tom Miller, qui s'était illustré lors du grand procès aux cigarettiers en 1998, exhortent la FDA à se "concentrer sur les comportements qui causent le plus de torts, en priorité le tabagisme"

Le droit à la réduction des risques pour les jeunes

Face aux préjudices du tabagisme, s'attaquer violemment au vapotage semble "contraire à l'éthique en ignorant ou refusant des opportunités de réduction des risques pour les jeunes". Des mesures disproportionnées porteraient atteintes directement aux adolescents en les privant de moyens de sortir ou d'éviter d'entrer dans le tabagisme. Alors que les suivis statistiques ont montré jusque-là qu'un nombre minuscule, en dessous de 0,1%, de jeunes américains "jamais-fumeurs" vapotent de manière régulière au moins 10 jours par mois.

Un plan anti-vape porterait atteinte aux jeunes aussi en favorisant le tabagisme adulte. "Le tabagisme parental et les modèles de rôles d'adultes sont des facteurs de risque et des prédicteurs importants pour l'initiation au tabagisme chez les jeunes", rappellent les spécialistes. Aussi, "les adolescents deviennent des adultes et les jeunes d'aujourd'hui ont un intérêt, pas nécessairement reconnu, à avoir de meilleures options pour leur avenir", soulignent les auteurs, insistant sur l'importance des "possibilités d'arrêter de fumer au cours des deux premières décennies de la vie adulte".

Goût amer

Or, une interdiction des arômes. telle que l'annonce en filigrane Scott Gottlieb, serait un frein considérable pour le développement du vapotage. "La FDA ne devrait pas interdire largement les arômes ni des catégories d'arômes d'e-liquide, car ceux-ci font partie intégrante de l'expérience du vapotage et son attractivité est à la base du potentiel de réduction des risques des produits de vapotage", précisent les auteurs. Alors que la FDA n'a pas de base factuelle lui permettant d'anticiper les conséquences d'une interdiction, les auteurs ne comprennent pas la logique qu'il y aurait à restreindre le vapotage aux seuls goûts "tabac et menthol".

"Pour résumer, la FDA devrait garder son sang-froid et réagir de manière proportionnée et impartiale aux nouvelles données sur le vapotage chez les adolescents. Une réaction réglementaire hâtive à un comportement à risque relativement faible pourrait compromettre une possibilité importante de santé publique de réduire les dommages liés au tabac en rendant les produits de vapotage peu attrayants, inefficaces et / ou inaccessibles", concluent les sept spécialistes.

Juulery report

Mais leur cause parait mal en point. Par anticipation des restrictions de la FDA, le cigarettier Altria (Philip Morris USA) a retiré de la vente ses arômes de vapotage autres que tabac et menthol le mois dernier. Hier, Juul a suivi le mouvement en retirant aussi les arômes autres que tabac et menthe des magasins physique et, de plus, interdit aux moins de 21 ans d'acheter ses produits. Aujourd'hui, un jeune américain de 18 ans peut s'acheter des armes à feu et un paquet de Marlboro, mais pas un pod à la mangue pour sa Juul. Tout un dispositif de contrôle d'identité et du volume de consommation personnelle est désormais en place sur le site de la start-up californienne pour surveiller ses consommateurs, en attendant un système de tracking physique par blue-tooth.

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