Malgré ses limites, une étude canadienne confirme que le vapotage augmente les chances d'arrêter de fumer

Un nouvel essai clinique canadien confirme l’efficacité du vapotage pour arrêter de fumer. Même lorsqu'il est restreint à un seul goût et un taux de nicotine unique. Les résultats de l'étude E3 ont été présentés lundi dernier au congrès scientifique, virtuel en raison de l’épidémie de Covid-19, de l’American College of Cardiology 2020. « Nos résultats montrent que le vapotage avec nicotine est efficace pour arrêter de fumer à court terme », déclare le Dr Mark Eisenberg, cardiologue à l’Hôpital général juif de Montreal et professeur de médecine à l’Université McGill. Le suivi des participants se poursuit sur une année. « Les données à plus long terme permettront de déterminer si les avantages persistent dans le temps », explique le Dr Eisenberg, auteur référent de l’essai clinique.

Les 376 participants ont reçu des conseils par téléphone et lors de visites en cliniques. L’essai a scindé les fumeurs en trois groupes randomisés. Dont deux groupes avec des vaporettes de marques Njoy à cartouches pré-remplies. Le premier avec des liquides goût tabac nicotinés à 15 mg/ml et le second avec le même liquide sans nicotine, tandis que le groupe témoin n’a reçu que les conseils. Les deux groupes vapoteurs, avec et sans nicotine, étaient en « double aveugle ». Les participants, pour 53 % des hommes, ont été recrutés sur le critère de vouloir arrêter de fumer. Ils avaient en moyenne 52 ans, dont 35 années de tabagisme, au rythme de 21 cigarettes par jours. 

Plus du double d’arrêts avec le vapotage

Après 12 semaines, le groupe vapotage nicotiné comptait 2,4 fois plus d’abstinents tabagiques depuis au moins une semaine que le groupe témoin. Tandis que ceux vapotant sans nicotine étaient presque le double (1,9 fois) a ne pas avoir fumé par rapport au groupe non-vapoteur. Les taux d’arrêts sont de 22 % parmi les 128 utilisateurs de vapotage nicotiné, 17 % des 127 vapoteurs sans nicotine et 9 % dans les 121 du groupe témoin.

L’abstinence en continu dès l’entame de l’essai a été réussie par six vapoteurs avec nicotine tandis qu’un seul participant sans vapotage a réussi ce challenge. Les vapoteurs sans nicotine se trouvent là aussi entre les deux groupes.

Une baisse de 60 % du nombre de cigarettes fumées

La moyenne de cigarettes fumées quotidiennement a également diminué plus sensiblement dans le groupe des vapoteurs avec nicotine, passant de 21 à 8 cigarettes, contre 10 chez les vapoteurs sans nicotine et 14 cigarettes par jour dans le groupe témoin.

En termes de survenue d’épisodes indésirables, sept participants ont eu des problèmes de santé sérieux durant les 12 semaines, dont un seul vapoteur avec nicotine, quatre vapoteurs sans nicotine et deux fumeurs du groupe témoin. « Aucun de ces événements n’a été considéré comme lié au traitement », précise le Dr Eisenberg. Des effets secondaires bénins connus dans le sevrage tabagique ont touché les trois groupes. Des pharyngites, des maux de tête et de la toux et des irritations de la bouche ont été un peu plus fréquents dans les groupes avec vapotage.

Entretien (7 min) entre le Dr Peter Block et le Dr mark Eisenberg à l’occasion du Congrès de l’American College of Cardiology le 31 mars 2020 https://youtu.be/CPacCpaaHkk 

Des retours lors de la conférence

Présente à la session présentant les résultats, qui devraient être publiés dans la revue JAMA, la Dre Nancy Rigotti, du Massachusetts General Hospital de Boston, a estimé que ce travail nourrit un domaine où il y a encore peu d’étude. Bien qu’une précédente étude plus conséquente, publiée dans le New England Journal of Medicine en janvier 2019, avec 886 Britanniques suivis sur un an a montré la nette supériorité du vapotage nicotiné sur les substituts nicotiniques pour l’arrêt tabagique.

La chercheuse, membre du comité de rédaction du rapport sur le vapotage en 2018 de la National Academies of Science, Engineering, and Medicine (NASEM), s’est demandé si des vaporettes plus récentes n’auraient pas un taux de réussite plus élevé. Elle a évoqué la Juul dont les liquides sont dosés à 59 mg/mL de nicotine aux États-Unis contre 15 mg/ml dans l’étude canadienne (et une limitation à 20 mg/ml au maximum dans l’Union européenne). 

Un essai soviétique à goût et taux de nicotine unique de 15 mg/ml

On peut aussi légitimement se demander si une autodétermination par l’utilisateur du taux de nicotine lui convenant, que ce soit plus ou moins concentré selon ses réactions de gorge et ses sensations de manque, ainsi que la possibilité de choisir un goût plaisant, n’aurait pas boosté les réussites et réduit les effets indésirables, notamment le manque, les maux de tête et la toux. Cela aurait été également plus réaliste par rapport aux conditions existantes dans le monde libre, où les débutants peuvent essayer les combinaisons qui leur conviennent, et les faire évoluer au fil de leur parcours de défume.

De son côté, le modérateur de la conférence, le Dr Eugene Yang, cardiologue à Seattle, a partagé les hésitations et les doutes de ses collègues devant les informations confuses et contradictoires sur le vapotage, notamment dans les médias. Il espère des données solides sur les effets pour les fumeurs à l’issue du suivi de cette étude, qui devrait se clore à la fin de l’année.


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