Le Conseil fédéral estime que l'Iqos n'est pas un produit sans fumée
Fin
septembre, la Conseillère nationale Ruth Humbel interpellait le
Conseil Fédéral pour savoir "pourquoi
les produits de tabac chauffé sans combustion ne sont-ils pas taxés
pour ce qu'ils sont, à savoir des cigarettes?".
La réponse
apportée par Alain Berset, Conseiller Fédéral de l'intérieur,
le 1er décembre à la députée démocrate-chrétienne justifie le
niveau de taxe adoucie pour l'Iqos, la Glo et la Ploom, présentes
sur le marché Suisse. "Les
produits heat-not-burn, à l'instar du tabac à pipe, relèvent de la
catégorie fiscale "autres tabacs manufacturés" et sont
soumis à une imposition de 12% du prix de vente au détail. Cette
taxation s'explique par le fait que les capsules et les sticks de
tabac diffèrent grandement des cigarettes ordinaires dans leur
fabrication et leur utilisation et que le tabac qu'ils contiennent
est chauffé et non brûlé",
explique le Conseil Fédéral.
La fumée de l'Iqos contient moins de substances nocives que celle des Marlboro
Pourtant,
l'exécutif convient auparavant que les cigarettes chauffées peuvent
ne pas dégager que de la vapeur. "Pour
les produits complexes contenant du tabac, la différence entre la
production de vapeur et celle de fumée n'est pas toujours claire car
il s'agit la plupart du temps d'un mélange de vapeur et de fumée,
en proportions variables", souligne les autorités se référant
à l'étude menée par le Pr Reto Auer, de l'Université de Lausanne.
Il s'avère que le produit Iqos "a) contient des substances
nocives identiques à celles de la fumée de cigarette et b) présente
de manière générale des quantités de substances nocives nettement
inférieures à celles de la fumée de cigarette".
Philip Morris pas d'accord dans la NZZ
Dans
la Neuer Zurcher Zeitung (NZZ), Philip Morris réagit à la
déclaration du Conseil Fédéral:"Nous
ne sommes pas d'accord avec la déclaration selon laquelle la vapeur
d'IQOS ne peut pas être considérée comme totalement sans
fumée". L'argument
de Philip Morris est que son produit ne générerait pas de
combustion. Pour le cigarettier, le fait que l'Iqos fonctionne si on le place dans un environnement sans oxygène prouve
l'absence de combustion. Pourtant la fumée
de cigarette est aussi composée en partie de pyrolyse, phénomène se déroulant sans oxygène,
qui semble clairement à l’œuvre
dans l'Iqos et sa chauffe à 350°C.
Les dégagements de la Glo, qui chauffe à 250°C d'après British American Tobacco, et la Ploom, qui serait chauffée à une énigmatique température de 30°C selon Japan Tobacco, n'ont pas été étudiés par des recherches indépendantes à ma connaissance (mais des études sont en cours). Il est possible que ces produits chauffés ne produisent pas les même toxiques que les cigarettes et l'Iqos. Il est possible que le phénomène de pyrolyse soit évité par leurs températures sensiblement plus basses que l'Iqos. Une réflexion sensée pour établir une réglementation ne devrait pas se baser sur le cas d'un produit raté pour légiférer l'ensemble d'un domaine. En l'état des connaissances, l'Iqos échoue à être sans fumée, mais cela ne signifie pas que toute l'approche du tabac chauffé soit à bannir.
Amalgame du vapotage aux cigarettes chauffées
Sans surprise au vu de sa ligne éditoriale sur le sujet, la
NZZ profite évidemment de l'occasion pour brouiller les pistes et amalgamer tabac chauffé et vapotage. Bien que la réponse du Conseil Fédéral distingue
clairement les deux types de produits. Contrairement aux cigarettes
chauffées, les produits de vapotage, qui fonctionnent par le
chauffage d'un liquide sans tabac, ne dégagent
ni monoxyde de carbone ni goudron. L'avant-projet de Loi sur
les produits du tabac (LPTab) présenté vendredi dernier par le
Conseil Fédéral amalgame tout de même aussi les deux produits,
vapotage et cigarette chauffée, pour en interdire l'usage dans les
lieux publics. Il est pourtant largement démontré que le «vapotage
passif», au sens sanitaire, n'existe pas. Un fait qui a amené notamment les autorités anglaises et françaises à autoriser le vapotage dans certains lieux publics, notamment les bars et les magasins de vapotage, etc.
Argent à l'odeur d'ammoniac
En coulisse de l'interpellation
de Ruth Humbel, la puissante Association pour la prévention
du Tabagisme (AT-Suisse) milite pour une taxation des produits de tabac
chauffés à l'égal des cigarettes conventionnelles. Soit un peu plus de la moitié du prix de vente, dont une part (0,3%)
revient au Fonds pour la Prévention du Tabagisme (FPT). Détail
piquant, mais révélateur sur l'état du milieu anti-tabac Suisse,
l'étude menée par le Pr Reto Auer, utilisée pour justifier cette taxation par AT-Suisse, n'avait reçu aucune aide
financière de ce Fonds. Celui-ci, doté d'environ 14 millions de Fs
en 2016, refuse par principe toute aide aux recherches dans le domaine de la
réduction des méfaits.
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