La Convention-cadre anti-tabac de l'OMS n'a pas eu d'impact sur la consommation mondiale de cigarettes

En 2003, l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) édictait la Convention-cadre de lutte anti-tabac (CCLAT ou FCTC en anglais). Des chercheurs canadiens ont analysé, à travers deux types de modélisation, l'impact de cet accord, ratifié par 181 pays, sur ses dix premières années d'existence en relation avec les tendances de consommation de tabac des décennies précédentes. "Aucun changement significatif n'a été constaté dans le taux de diminution de la consommation mondiale de cigarettes après l'adoption de la CCLAT en 2003", conclue l'étude parue en accès libre dans le British Medical Journal (BMJ).

Impact global nul, mais variations entre des régions

Globalement, la tendance d'une lente baisse du nombre de cigarettes consommées par personne s'est maintenue après l'entrée en vigueur de la CCLAT. "Néanmoins, cette conclusion générale nulle masque un écart important entre les tendances observées après 2003 entre les pays à revenu élevé et les pays à revenu faible et intermédiaire, ainsi qu’entre les pays d’Europe et d’Asie", soulignent les chercheurs.

Après une décennie de baisse, la consommation moyenne de cigarettes par les européens était repartie à la hausse sur la deuxième moitié des années 1990'. La signature de la CCLAT en 2003 est concomitante d'un second renversement de tendance. A partir de cette date, l'Europe voit de nouveau le nombre de cigarettes consommées par habitant diminuer. A l'inverse les pays à revenu par habitant faible ou intermédiaire ont connu une augmentation du nombre de cigarettes per capita, notamment en Asie.

Une hypothèse complotiste douteuse

Cette analyse statistique ne permet pas d'établir de rapport de causalité. Pourtant, les chercheurs proposent en conclusion une hypothèse explicative, à vrai dire étrange. La mise en œuvre des politiques de lutte antitabac aurait pu inciter l'industrie du tabac à délaisser son lobbying dans les pays à revenu élevé pour se concentrer sur les pays asiatiques.

Sauf que les Big Tobacco occidentaux - Philip Morris, BAT, Japan Tobacco et Imperial - sont marginaux sur la plupart des grands marchés asiatiques. China Tobacco détient le monopole en Chine, deux firmes locales vendent plus de 80% des cigarettes en Inde (l'Etat détient 36% du capital de la principale ITC), le monopole du tabac sévit en Thaïlande...

L'hypothèse que les auteurs jugent auto-complaisamment "convaincante" ne me parait pas tenir la route. Elle semble pourtant couramment reprise dans le milieu anti-tabac traditionaliste. Une manière de pouvoir continuer de fermer les yeux sur l'instrumentalisation de la lutte anti-tabac d'Etats asiatiques pour protéger leurs industries du tabac face à la concurrence des marques occidentales et par ailleurs du vapotage ?



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